Magnésium, dangereuse carence

« En cas de crampe, prenez du magnésium ! » Qui n'a jamais entendu ce conseil bienveillant gravé dans l'esprit populaire qui, bien souvent, en ignore l’essentiel ? Car l’importance de ce minéral dépasse largement l’efficacité du petit coup de fouet musculaire qu'on lui attribue, comme une vitamine C contre une grande fatigue. Découvert en 1810, les bienfaits d'une supplémentation sont démontrés un siècle plus tard, mais pas écoutés.
En 1971, un nouveau départ s'opère grâce au docteur Jean Durlach qui organise le premier Symposium international sur le magnésium : à l'époque, les chercheurs le définissent déjà comme l’« ion oublié ». Aujourd'hui, il fait l’objet de nombreuses études à travers le monde qui prouvent son rôle capital et ses propriétés thérapeutiques remarquables.

300 actions métaboliques
Le magnésium est indispensable en biologie humaine : il participe à plus de trois cents réactions métaboliques. Et, après le potassium, c'est le deuxième ion intracellulaire le plus présent à l'intérieur des cellules qui en contiennent 34 %. Il favorise l'absorption du sodium, du potassium et du calcium dont l'équilibre en dépend. Seul un tiers du magnésium apporté par l'alimentation est absorbé par l'intestin, les deux autres tiers étant éliminés par les selles. Il se retrouve dans le sang, 1 % reste extracellulaire, le reste (65 %) n'est pas dosable car localisé dans les os et les muscles.
L'action la plus importante du magnésium se situe dans le système nerveux central où, avec la vitamine B6, il régule la transmission de l'influx nerveux et la libération des messages chimiques du cerveau : ainsi, tous deux favorisent la synthèse des neuromédiateurs. Il joue un rôle dans l'équilibre nerveux et musculaire : une hypomagnésémie au niveau du liquide céphalo-rachidien, comme du cerveau, se traduit par des crises épileptiques et des crises convulsives, de la spasmophilie ou de la tétanie.
Il possède également une fonction primordiale sur le système cardiovasculaire. On connaît depuis longtemps son pouvoir vasodilatateur : il permet une meilleure vascularisation, c'est-à-dire un meilleur apport de sang et d'oxygène aux différents organes. Du coup, il diminue aussi la tension artérielle. Le déficit chronique ou aigu peut entraîner des troubles du rythme cardiaque, des palpitations, des tachycardies, et l'augmentation de la mortalité cardiovasculaire.
Dans le sang, une faible concentration en magnésium extracellulaire augmente l’agrégation des plaquettes, donc le risque de formation de caillots dans les vaisseaux. Au contraire, une augmentation entraîne une action anticoagulante et prévient les thromboses.
Depuis quelques années, les publications dans des revues internationales sur le rôle du magnésium dans le vieillissement cellulaire se multiplient : de fait, c'est un facteur majeur de résistance au stress oxydant – physique, émotionnel ou stress du quotidien – qui, lui, accélère le vieillissement de nos cellules. Sans lui, les hormones du stress augmentent sa fuite au niveau rénal.

Un antidépressif 
Sur le terrain de la dépression, on sait depuis longtemps qu’il existe une relation entre l’équilibre du magnésium et les troubles de l’humeur : on connaît l’efficacité du traitement – en rétablissant un taux normal, les hormones du stress diminuent –, largement prescrit il y a cinquante ans déjà mais délaissé au profit des antidépresseurs. Pourtant, chez les personnes
qui souffrent d’une dépression majeure, on retrouve toujours un taux abaissé de magnésium dans le sang ainsi que dans le liquide céphalo-rachidien.

Carence et Alzheimer
Chez les personnes âgées, cette déficience peut trouver son origine dans une carence nutritionnelle. Plusieurs études ont été publiées sur le lien entre hypomagnésémie et maladie d’Alzheimer, dont une par l’Inserm à Paris, en 2006 : « La carence ajoutée au stress favorise une perte des acquisitions et de la mémoire. » Plus récemment, deux autres présentations, l’une au Congrès européen sur le magnésium en 2008, l’autre au 12e Symposium international sur le magnésium en Roumanie, en 2009, qui indiquent : « Une forte concentration cérébrale en magnésium rétablit les facultés cognitives et les connexions synaptiques chez la souris atteinte d’Alzheimer. » Plus le taux de magnésium prescrit en traitement est élevé dans le cerveau, plus l’amélioration est importante : il agit en « prévenant les pertes de synapses ».
De même, des travaux ont montré que la déficience sur plusieurs générations est associée au développement de la maladie de Parkinson. Le mécanisme exact reste inconnu mais il semble lié à une anomalie de son transport.
Le magnésium possède aussi de nombreux autres rôles, plus reconnus : il participe au métabolisme des glucides et des lipides, et à la synthèse des protéines. Il contribue à la croissance, la mémoire, aux mécanismes de défense immunitaire, au transit intestinal. Il agit sur la thyroïde : une carence peut induire une hypothyroïdie. Il a été utilisé avec succès dans les cas de polio. Quant aux os, on sait qu’il agit sur le métabolisme du calcium auquel il est étroitement lié, d’où le risque d’ostéoporose.

Trois Français sur quatre en carence
L’étude Suvimax a montré que les Français sont massivement carencés en magnésium : 75 % des hommes et 77 % des femmes absorbent une quantité inférieure aux « apports nutritionnels conseillés » (lire ci-dessous Quel magnésium pour quel dosage ?). Les causes peuvent être multiples. D’abord l’alimentation : les sols appauvris par l’exploitation intensive et l’utilisation abusive d’engrais entraîne une diminution de la teneur en magnésium dans les cultures. Également, la mauvaise alimentation (snacking) et la restriction alimentaire (régime). Ensuite, cette carence peut être due à un trouble de l’absorption intestinale ou une perte rénale, à une forte consommation d’alcool qui augmente l’élimination rénale, tout comme le café. Enfin, de nombreux médicaments couramment absorbés (anti-asthmatiques, cardiovasculaires, diurétiques…) provoquent des insuffisances.
Mais il semble de plus en plus évident qu’une déficience sévère soit très souvent d’origine génétique : une anomalie du transport du magnésium dans la cellule. Selon des travaux récents, le magnésium a une action sur les gènes car il est impliqué à la fois dans la stabilisation et la dégradation de la structure de l’ADN : ainsi, l’anomalie de la carence se transmet de génération en génération.
Malgré ses bienfaits, le magnésium reste sous-estimé, à commencer par les professionnels de santé eux-mêmes. Pourtant, en prévention comme en traitement, pour des symptômes bénins ou des pathologies plus invalidantes, il améliore le quotidien et permet d'aborder la vie avec un regard plus positif. Un minéral à réintégrer d'urgence.
Francine Gaspari
Principes de santé n° 35 (juin 2011)
TDAH et autisme :
des pistes encourageantes

On soupçonnait l’hypomagnésémie d’être un facteur lié à l’hyperactivité chez les enfants. Les longues recherches cliniques menées par le docteur Marianne Mousain-Bosc ont confirmé sa responsabilité majeure dans le TDAH (trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité). Pourtant, la médecine conventionnelle ne donne qu’une seule réponse : la prescription de la Ritaline ou du Concerta. Depuis longtemps dénoncés pour les effets secondaires, parfois graves (perte de l’appétit, insomnie, anxiété, nervosité, tics, états dépressifs…), ces médicaments appartiennent à la classe des stupéfiants. Ils entrent d’ailleurs dans la Liste des 77 médicaments au suivi renforcé établie par l’ex-Afssaps, suite au scandale du Médiator.
Contactée en février 2011 par l'agence dans le cadre du comité technique de pharmacovigileance sur ces produits, le docteur Mousain-Bosc attend toujours cette réunion initialement prévue en avril 2011 ! Outre l'Agence du médicament, elle avait d'ailleurs alerté les instances de santé : l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), le conseil national de l'Ordre des médecins et la Cnam du Gard, toutes restées muettes.
Longtemps pédiatre au CHU de Nîmes, elle a suivi près de 400 enfants souffrant de TDAH, dont la moitié sous traitement médicamenteux : 89 % d'entre eux présentaient une déficience lourde en magnésium. La supplémentation a, chaque fois, permis très rapidement un retour à la vie normale, sociale et familiale. Mais elle a pu observer des résultats similaires et encourageants avec des enfants autistes.
Depuis quelques années, l'autisme (ou troubles envahissants du développement) est considéré comme d'origine neurobiologique, qui prend racine dans la période prénatale ou périnatale par la transmission des gènes mutés. L'hypomagnésémie peut donc être responsable de la difficulté des apprentissages et autres troubles du comportement ou du langage. Des études de plus en plus nombreuses viennent le confirmer, comme celle de Cochrane, publiée en 2009. Néanmoins, le magnésium ne se substitue pas, dans un premier temps, à la prise en charge de l’enfant autiste, mais il l’accompagne dans sa progression. Et Marianne Mousain-Bosc prévient : « Autisme ou TDAH, il faut systématiquement rechercher la carence parmi les antécédents de l’enfant et de la famille, ceux qui ont présenté les mêmes troubles : stress, nervosité, migraine, émotivité, crise de spasmophilie… »
F. G. 
Quel magnésium pour quel dosage ?

L’apport se fait notamment par la consommation d’aliments riches en magnésium : chocolat, amandes, crabe, crevettes, dattes, figues séchées, germe de blé, cacahuètes, haricots secs, fèves, maïs, riz brun, etc. Il peut aussi être réalisé par
des eaux riches en magnésium : Hépar, Contrex, Quézac… L’absorption, qui se situe particulièrement dans l’intestin grêle, débute une heure après l’ingestion et peut se prolonger pendant deux à
huit heures. Le magnésium trouve plus d’efficacité quand il est absorbé par petites doses successives tout au long de la journée.
La recommandation est fixée à 420 mg/jour pour un homme de 70 kg, et 330 mg/jour pour une femme
de 55 kg, soit 6 mg/kg par jour. Il sera plus important chez les adolescents en forte croissance, chez les sportifs, pendant la grossesse et durant la lactation. Sauf insuffisance rénale, unique cas pour lequel il est contre-indiqué, il n’y a pas d’effet secondaire lourd : tout au plus une diarrhée, le corps éliminant le surplus naturellement.
Plusieurs marques proposent du magnésium en gélules, comprimés, ampoules buvables, sous forme de lactate, carbonate ou chlorure : leur prix et leur qualité sont variables. On peut opter pour un chlorure de magnésium : le nigari (2 € le sachet de 100 g). Son petit prix cache une grande qualité et efficacité, d'autant que cette forme de magnésium
est en plus très bien tolérée par l'organisme. En supplémentation : diluer 20 g dans un litre d’eau peu minéralisée (bannir l'eau du robinet), à conserver au réfrigérateur. Verser 1 cuillère à soupe de ce mélange dans un verre, allonger avec un jus de fruit (sauf orange, citron et pamplemousse, trop acides – le jus de pomme passe très bien) ou de légume car c'est très amer. Boire ce mélange chaque matin pendant trois semaines. Faire une pause pendant dix jours. Puis reprendre la cure tant que le besoin se fait sentir (et surtout, ne pas suivre la posologie indiquée sur le paquet, au risque de fatiguer les reins et irriter le côlon !) 
F. G.
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